Un épisode de la "guerre froide" est peu connu, et mérite pourtant d'être analysé: La CIA ou le MI6 , par exemple, n'étaient pas les seuls a collecter des renseignements de manière clandestine sur le territoire soviétique. Parmi les services secrets actifs, il faut en effet citer les services secrets chinois, roumains , yougoslaves...et nord-coréens. C'est ce qui transparaît du peu de documentation accessible sur le sujet, mais qui sera analysé, ainsi que les activités des services secrets de la République Populaire de Corée du Nord après la chute de l'URSS en 1991, ou la aussi on devra se contenter d'informations extrêmement incomplètes, parcellaires, mais qui permettent néanmoins de dresser un certain tableau.
Il convient d'abord de souligner que très peu d'informations sont disponibles sur les services secrets nord-coréens, le régime de Pyongyang étant extrêmement fermé, rendant les fuites d'informations extrêmement difficiles. Les informations obtenues font état au minimum de trois services secrets: Le SSD, Ministère de Protection de la Sécurité de l'Etat, chargé aussi bien du contre-espionnage que de l'espionnage, et qui constitue un équivalent du Guojia Anquanbu chinois ou du KGB soviétique ; le service de renseignement du Ministère de la Défense, en charge du renseignement militaire; le service de renseignement du Parti, devenu en 1998 la "35ème chambre", plus connu sous le terme de Section de Liaison du Comité Central du Parti des Travailleurs Nord-Coréen.
Il convient en effet de revenir aux années 60, qui sont marquées par le schiisme au coeur du Bloc communiste: La République Populaire de Chine décide de prendre publiquement ses distances avec l'URSS, suivie en cela par l'Albanie, puis beaucoup plus tard par la Corée du Nord. Les accusations de "réactionnaire faisant le jeu de l'impérialisme" fusent de part et d'autre, marqué par des incidents meurtriers a la frontière russo-chinoise, avec des accrochages entre les gardes-frontières du KGB et les troupes chinoises au sujet des Iles Damansk. Dans ce contexte, les services secrets des deux Blocs s'activent pour espionner l'autre. Avant , avait ete constatee la propension de Pyongyang a espionner ses allies surtout dans le domaine industriel, et ce pour developper l industrie et le domaine militaire. La collecte du renseignement depuis sa résidentura de Pyongyang étant très difficile, le KGB agit par conséquent en périphérie, par exemple depuis son poste de Copenhague contre les nord-coréens. Les nord-coréens font de même, en utilisant pour leurs opérations deux bases: La première est la station des services secrets nord-coréens sous couvert de leur ambassade a Moscou, pour collecter des renseignements dans la capitale soviétique. La deuxième est dûe a la géographie, la Russie et la Corée du Nord ayant en commun des frontières maritimes mais aussi terrestres, les services secrets nord-coréens infiltrent, recrutent dans la zone Extrême-Orient de la Russie, se basant pour cela sur la communauté coréenne qui est surtout implantée dans cette région. Le résultat ne se fait pas attendre, le KGB constatant l'activation des nord-coréens, y répond en mettant a jour les réseaux du régime de Pyongyang, dont les priorités en URSS sont les informations a caractère économique, industriel et militaire.
Dans son rapport n°646-A/OB du 02.04.1979 relatif au travail du KGB sur l'année 1978, le Patron du KGB Youri Andropov note en page 5 que le KGB a empêché les représentants des services secrets yougoslaves, roumains ET NORD-COREENS de faire de l'espionnage en direction de l'URSS. Dans le même rapport, en page 10, Andropov indique clairement que le KGB n'a aucun contact avec les services secrets de ses trois pays..
Cette tendance n'aura de cesse de se confirmer par la suite, comme le montrent les rapports annuels du KGB déclassifiés: Dans sa note N° 877-A/OB du 31.03.1981 relatif au travail du KGB pour l'année 1980, le patron du KGB Youri Andropov indique clairement que "a été mise a jour et neutralisée -c'est a dire démantelée la station dirigée par l'attaché militaire de l'ambassade de Corée du Nord a Moscou Khen Kim Ser, ce dernier ayant des contacts avec les services secrets chinois.5 citoyens soviétiques qui faisaient de l'espionnage pour le compte de la Corée du Nord ont été interpellés. Le même rapport évoque 2 citoyens coréens (sans doute de Corée du Nord) , agents des services secrets coréens et qui étaient auditeurs d'une école militaire. Le duo a été expulsé.
Une des possibilités d'action des services secrets nord-coréens est tout simplement d'infiltrer la zone Extrême-Orient, ce que montrent une nouvelle fois les rapports déclassifiés du KGB : Pour l'année 1981, le KGB aurait démasqué 6 espions nord-coréens, citoyens coréens, en Extrême-Orient (Rapport du Directeur du KGB Youri Andropov du 10.04.1982 sur les activités du KGB pour l'année 1981, a l'intention du Secrétaire Général du PCUS Léonid Brejnev). Durant l'année 1982, c'est 5 personnes, infiltrées dans la colonie coréenne a Sakaline, qui sont démasquées (Rapport du 15.03.1983 du Directeur du KGB Tchébrikov sur l'activité du KGB pour l'année 1982, a l'intention du Comité Central du PCUS et du Secrétaire Général du PCUS Youri Andropov)
L'arrivée au pouvoir de Boris Eltsine est évidemment mal vue par le pouvoir nord-coréen; la fin de l'URSS, et donc de l'idéologie communiste, est proclamée, tandis que la nouvelle équipe dirigeante tourne ostensiblement le dos au communisme mais aussi au régime dictatorial de Pyongyang au profit de Séoul, qui est entré dans l'ère démocratique en 1988. Les échanges bilatéraux se développent donc entre la Russie et la Corée du Sud, y compris au niveau commercial, a la grande fureur de Kim Il-Sung.
Cette ouverture de la Russie a la démocratie et la fin du régime comuniste, accompagné du démantèlement, au moins partiel , du KGB, n'est toutefois pas forcément une mauvaise chose pour la République Populaire: La chute de l'URSS a aussi entraîné une baisse drastique du Complexe Militaro-Industriel accompagné d'une forte inflation (a partir de 1992) qui touche surtout les classes moyennes et les personnes disposant de peu de revenus. Et la baisse de la surveillance très présente des services de contre-espionnage russe. Nombre d'ingénieurs n'ont plus guère les moyens de subvenir a leurs besoins, ce qui constitue un excellent terrain pour les services secrets nord-coréens, qui s'efforcent de les recruter pour les convaincre d'aller travailler en Corée du Nord, ou de leur transmettre des informations sur les développements de nouveaux armements. Comme durant l'URSS, les services secrets nord-coréens opèrent en direction de Moscou et de la zone Extrême-Orient. Deux scandales le démontrent: Fin 1993 c'est l'annonce officielle de l'expulsion d'un membre de l'ambassade de Corée du Nord a Moscou, le conseiller Nam Gae-Wok. Ce Général-Major s'efforcait de recruter des scientifiqus russes spécialisés dans le domaine spatial et des missiles pour les convaincre d'aller travailler en Corée du Nord. (The Times du 17.11.1993 page 10).
En 1995 le contre-espionnage russe empêche de justesse un citoyen nord-coréen,Khan Shan Gela, d'avoir accès a des informations a caractère militaire: Il s'apprêtait a avoir accès a une miraillette faite pour le combat sous l'eau. Un équipement utilisé par les unités d'élites de marine militaire russe de l'Océan Pacifique. Pour cela , il avait réussi a convaincre un officier d'un des services de la région Océan Pacifique. Le nord-coréen a été interpellé a Vladivostok par le FSB pour la région de l'Océan Pacifique.
Priorite est donc donnee aux nouvelles technologies militaires, le regime de Pyongyang etant toujours en etat de guerre avec son voisin du Sud, lequel voisin peut compter sur l allie americain. Il s agit donc de compenser au maximum voire d essayer de rattraper le retard du regime de Pyongyang, y compris en espionnant le voisin russe, specialise dans la production de technologies ;ilitaires qui peuvent etre de haut vol.
DOCUMENTS
№ 48
31.03.1981. Записка № 877-А/ОВ председателя КГБ СССР Ю. В. Андропова Генеральному
секретарю ЦК КПСС Л. И. Брежневу «Отчет о работе Комитета государственной
безопасности за 1980 год».
Особой важности
ОСОБАЯ ПАПКА359
Отчет о работе Комитета
государственной безопас-
ности СССР за 1980 год
Вся
Первостепенное значение придавалось срыву попыток спецслужб
противника
создать агентурные позиции в нашей стране. Разоблачены
2 агента американской, 2 западногерманской разведок из числа совет-
ских граждан, 6 засланных в СССР агентов спецслужб Китая. Выявле-
на и ликвидирована разведывательная резидентура, возглавлявшаяся
связанным со спецслужбами Китая военным атташе посольства КНДР
в Москве Хен Кым Сером, арестовано 5 советских граждан, привле-
ченных корейцем к шпионской деятельности.
Пресечена путем выдворения из Советского Союза шпионс-
кая деятельность двух агентов корейских спецслужб из числа слушате-
лей высшего военного училища.
10.04.1982. Записка № 728/А-ОВ председателя КГБ СССР Ю. В. Андропова Генеральному
секретарю ЦК КПСС Л. И. Брежневу «Отчет о работе Комитета государственной
безопасности за 1981 год».
Особой важности
ОСОБАЯ ПАПКА 373
На Дальнем Востоке выявлено 6 агентов спецслужб КНДР из числа
корейских граждан.
№ 53
15.03.1983. Записка № 547-Ч/ОВ председателя КГБ СССР В. М. Чебрикова в ЦК КПСС и Ге-
неральному секретарю ЦК КПСС Ю. В. Андропову «Отчет о работе Комитета госу-
дарственной безопасности СССР за 1982 год».
Особой важности
Установлено 5 агентов спецслужб КНДР в корейской колонии на Сахалине
Commentaires
Tiens, j'ignorait cela, c'est vrai la Corée du Nord était plus proche de Pékin que de Moscou mais de la s'aventurer à espionner son puissant voisin...
Oui cela peut étonner, mais il ne faut pas oublier que même entre alliés on n'hésite pas a s'espionner.. voire a utiliser des méthodes plus délicates. Selon le site "agentura.ru" ,en 1959, les nord-coréens n'ont pas hésités a enlever un citoyen nord-coréen a Moscou qui s'opposait au régime de Pyongyang. Il n'a du la vie sauve que en sautant par la fenêtre de l'ambassade de Corée du Nord a Moscou....
En tout cas les deux camps se sont espionnés, c'est ce que indique par exemple Oleg Gordievsky dans son livre sur le KGB publié avec Christopher Andrew en 1990: selon lui le KGB a espionné les nord-coréens, entre autres depuis sa station de Copenhague..
Depuis les Pays Bas ? Ils surveillaient, je suppose, les activités nord coréennes en Europe, pas la RPDC elle méme.
oui. les missions diplomatiques, les maisons d'amitiés..peu de pays d'Europe entretiennent des relations diplomatiques avec la Corée du Nord. De mémoire la Grande-Bretagne, l'Autriche, quelques pays scandinaves, peut être le Danemark..a vérifier